Affaire EncroChat : le Tchat, botté !
Plus de 6 500 arrestations, 270 tonnes de drogues, 900 millions d’euros saisis, 115 millions de messages interceptés. L’affaire Encrochat, le téléphone sécurisé des mafias, décortiquée mardi, à Lille.
Mardi 28 juin, Carole Etienne, procureure de la République et son homologue néerlandaise Renkse Mackor sont revenues sur trois ans d’enquête concernant l’affaire EncroChat. EncroChat était une entreprise qui fournissait des téléphones portables sécurisés et chiffrés, conçus spécifiquement pour les communications confidentielles. Ces appareils étaient commercialisés comme des dispositifs hautement sécurisés, destinés principalement à un usage professionnel, notamment par des individus tels que des chefs d’entreprise, des avocats et d’autres personnes souhaitant protéger leurs communications sensibles. Pas de micro, pas de caméra, un bouton « panic » permettant de détruire les contenus du téléphone à la première pression. Un téléphone basé sur une version modifiée du système d’exploitation Android. Le chiffrement de bout en bout des messages, vocaux et textos, devaient rendre inviolable les communications. Coût de l’appareil, 1000€, sans toutes les options.
Seulement, en juin 2020, une opération internationale est lancée à l’encontre des usagers d’EncroChat. Une action conjointe entre les autorités françaises, néerlandaises et d’autres pays européens, dans le cadre d’une enquête sur des activités criminelles présumées. Vous retrouvez l’interview du Général Boget, patron du Commandement Cyber de la Gendarmerie, revenant sur cette affaire ici.
Trois ans d’enquêtes plus tard, mardi 28 juin à Lille, Carole Etienne, procureure de la République, son homologue néerlandaise Renkse Mackor et Jean-Philippe Lecouffre, le directeur d’Europol, ont fait le bilan de cette opération. Le système était hébergé chez OVH, à Roubaix. 123 pays ont été concernés par cette opération. 6 658 personnes arrêtées (165 en France ; 2 864 au Royaume-Uni), 270 tonnes de drogue saisis, 900 millions d’euros, 83 bateaux, 40 avions, 971 voitures et camions, 271 propriétés. Pour un coup de filet, ce fût un sacré coup de filet.
Et c’est pas fini !
Une affaire qui n’est pas terminée. Beaudouin Thouvenot, d’Eurojust, indique que des assassinats, enlèvements et règlements de compte ont pu être stoppés à temps grâce à l’infiltration d’EncroChat. Des utilisateurs sont toujours recherchés. Ils sont au nombre d’une dizaine. Un au canada, un autre en République Dominicaine.
Le mois dernier, la National Crime Agency (NCA) du Royaume-Uni, une agence gouvernementale chargée de lutter contre la criminalité organisée, le terrorisme et la cybercriminalité à l’échelle nationale et internationale remportait une importante contestation judiciaire concernant l’infiltration d’Encrochat. Une défaite aurait pu compromettre des milliers d’arrestations basées sur les preuves obtenues lors de l’infiltration d’Encrochat.
A noter que des revendeurs ont été mis en examens. Leurs avocats ont d’ailleurs fait appel à ce sujet. La décision de la cour d’appel de Douai les concernant est attendue dans quelques jours.
L’infiltration d’EncroChat a permis de suivre 115 millions de messages envoyés, dont la plupart étaient échangés par des criminels.