Vie privée : la face cachée du big data
« Big Brother is watching you ». Cette phrase célèbre est tirée du roman dystopique 1984 de George Orwell, racontant une histoire dans laquelle tous les citoyens du pays sont constamment surveillés par le gouvernement. Mais bien qu’il s’agisse d’une œuvre de science-fiction, la société ultra-connectée dans laquelle nous vivons en est beaucoup plus proche qu’il n’y paraît.
Tous les jours, des milliards d’utilisateurs visitent des sites internet, reçoivent des e-mails, envoient des messages, etc… Des données sont constamment produites au point de prendre des proportions très difficiles à analyser ou stocker : c’est le big data. Ce vaste gisement de données représente une véritable mine d’or pour les entreprises commerciales, et dans certains cas, pour les autorités gouvernementales.
Le commerce de la donnée
La publicité ciblée est une pratique aujourd’hui courante dans le marketing numérique. Elle nécessite cependant l’obtention de données sur les utilisateurs, et les méthodes utilisées pour y parvenir vont parfois plus loin que les cookies ou Google Analytics.
Plusieurs agences digitales proposent de récupérer des données sur les réseaux sociaux afin de les revendre à des clients, la plupart du temps des publicitaires. Cette pratique, bien que peu connue, est relativement courante dans le milieu numérique. Toutefois, il peut arriver que le client de l’agence n’ait pas un but commercial, mais politique.
Ce fut le cas dans le très récent scandale Cambridge Analytica, au cours duquel cette agence d’analyse de données s’est procurée illégalement les données Facebook privées de 87 millions d’utilisateurs au profit de la campagne présidentielle de Donald Trump. Cette affaire a créé une véritable levée de boucliers sur les réseaux sociaux, avec notamment l’apparition du hashtag #DeleteFacebook invitant les utilisateurs à supprimer leur compte, tout simplement. D’ailleurs, dans le cas où vous souhaitez faire pareil, cet article sur la suppression de votre compte facebook vous expliquera étape par étape comment procéder.
Surveillance de masse
Les révélations d’Edward Snowden en 2013 représentent une mise en lumière sans précédent sur les pratiques de surveillance de masse mises en œuvre aux États-Unis ainsi que dans le reste du monde par la NSA et le GCHQ (équivalent britannique). Ces révélations lui vaudront d’ailleurs d’être poursuivi par le gouvernement américain au point de devoir fuir à Hong Kong puis en Russie, où il réside toujours à l’heure où ces lignes sont écrites.
Le diagnostic suivant ces révélations est très sombre : écoute téléphonique, interception et stockage des coordonnées GPS de centaines de millions de téléphones dans le monde, interception et stockage de l’historique internet des utilisateurs, collecte de SMS et de messages privés sur les réseaux sociaux, collecte secrète d’images en ligne ou via la webcam des utilisateurs pour créer une base de données de reconnaissance faciale, et la liste est encore très longue.
En Chine, pays à 1,3 milliards d’habitants, la surveillance de masse s’apprête à passer un nouveau palier. Un grand projet de surveillance utilisant le big data devrait voir le jour en 2020 : chaque habitant se verra attribuer une note sociale en fonction de son comportement, ce qui résultera en bénéfices ou pénalités dans la vie quotidienne. Parmi les critères de notation figurent le respect du code de la route, la bienséance dans les espaces publics, mais aussi les éventuels commentaires politiques sur les réseaux sociaux…
En fin de compte, à l’ère du tout numérique, il est difficile de savoir à quel point la vie privée l’est réellement. Mais le big data est là, et l’on ne peut rien y changer. Alors le mieux que l’on puisse faire, c’est de continuer de vivre, en connaissance de cause.
Et si la solution était de mentir aux machines ? Visiter de sites web sans lien avec nos attentes, changer de noms, de pseudos, d’age, de nombre d’enfants, d’adresses… bref de pourrir les données à la source pour rendre inopérants les algorithmes ?